Pas à pas, dans la bonne direction

Un constat pour commencer : le tiers des émissions mondiales de CO₂ proviennent des transports et 70% de cette pollution sortent des pots d’échappement des voitures et des camions. La diminution des gaz à effets de serre passe donc immanquablement par un changement de nos habitudes de transport. Et les politiques publiques tentent, parfois contre vents et marées, d’inciter les populations à aller vers une mobilité plus durable.

Il convient de reconnaître que tous les territoires ne sont pas égaux dans cette bataille contre ces gaz qui sont à l’origine du changement climatique et dont on mesure ces derniers mois, dans une forme d’impuissance inquiète, les conséquences désastreuses, de Sierre à Valence, de l’Ardèche aux Grisons. Et le territoire du Parc, avec sa géographie préalpine, ses villages disséminés et son modeste réseau de transports publics, n’est pas le plus propice pour faire sa révolution modale et abandonner les véhicules individuels.

Faut-il pour autant se résigner et abandonner toute volonté de changement ? L’ambition d’une mobilité moins polluante n’est pas le seul argument dans la balance. Au volant de nos voitures, nous assistons à une détérioration constante de la mobilité. L’augmentation de la population, suivie parallèlement par celle du parc automobile, engendre une paralysie progressive de nombreux axes routiers. Les personnes du Pays-d’Enhaut et de la Gruyère qui empruntent aux aurores la route de contournement de Bulle – et ne parlons pas du retour en fin de journée ! – affrontent quotidiennement des bouchons. Les axes sont toujours plus saturés, l’accès aux villes devient problématique.

Reste que la mobilité se tient au cœur de nos activités professionnelles et de nos loisirs. Comme cette mobilité nous est indispensable, elle peine à être questionnée. Car ce sont nos petits conforts et nos habitudes qui sont susceptibles d’être remis en cause. Au sein du Parc, nous sommes cependant convaincus que ces changements sont nécessaires. Et le territoire d’un Parc comme le nôtre constitue un espace idéal pour accélérer le mouvement vers une autre mobilité. Il est le cadre efficace pour encourager le débat, favoriser la prise de conscience, lancer des projets.

Le rôle du PNR dans cette aventure ? Il doit trouver une place entre les communes, les associations régionales et les cantons qui disposent de compétences légales, avec des objectifs à atteindre. Il souhaite mettre à disposition sa force de conviction afin d’entraîner, de motiver, de coordonner. Le PNR est convaincu que la transition que nous avons collectivement à réaliser doit être portée par le terrain.

Et c’est sur le terrain que le Parc a engagé cette réflexion. En organisant ces derniers temps des États généraux et son Forum des communes sur cette thématique, le Parc avait l’ambition de semer des graines afin de de susciter la réflexion, mobiliser les bonnes volontés et d’encourager des projets. Les débats ont été productifs : plusieurs actions seront intégrées au prochain plan de gestion. Des actions concrètes, pratiques, comme l’encouragement au covoiturage ou à l’autopartage – facilité aujourd’hui par les applications numériques – ou comme la création de voies vertes pour accéder aux écoles. Il est aussi question de bus de rabattement pour connecter au réseau les sites plus éloignés ou encore de favoriser l’accès en transport collectif aux manifestations locales.

Dans cette bataille vers une autre mobilité, on va tâtonner, on va se tromper. Les déceptions vont parfois succéder aux élans innovants. Mais le Parc voit son rôle comme un laboratoire d’idées et d’actions, loin des planifications globales et souvent théoriques. Au contraire, une stratégie des petits pas, tissée de multiples initiatives locales, en lien avec les besoins des habitants de ce territoire. Comme ce fut le cas pour les projets déjà réalisés que sont les bus du Gros Mont et de La Valsainte, le système d’autostop J’te Pouce ou l’offre d’autopartage en gare de Château-d’Œx.

Patrice Borcard, président du Parc