De l'herbe à l'assiette : les foins de rocher

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L’agriculture est un métier aussi passionnant qu’éprouvant qui se pratique tout au long de l’année, au rythme des saisons. Afin de mettre en lumière les multiples tâches qu’effectuent les agriculteurs et agricultrices dans le Parc, une chronique, intitulée De l’herbe à l’assiette, leur est à présent dédiée dans notre lettre d’information. Le mois juillet est l'occasion d'expliquer ce que sont les foins de rocher.

La tradition des foins de rocher est une pratique agricole ancestrale qui consiste à récolter le foin dans des zones escarpées, souvent rocheuses, inaccessibles aux machines modernes. Aujourd'hui, bien que moins courante, cette tradition persiste dans certaines régions du Parc, notamment au Pays-d’Enhaut. C’est généralement courant juillet que les agriculteurs consacrent du temps mais surtout de l’effort à entretenir ces terrains pentus essentiels à la biodiversité.

Alors que la saison d’alpage bat son plein, il faut déjà penser aux réserves de fourrages qui serviront de nourriture au bétail durant l’hiver. Certaines parcelles, sont relativement faciles à faucher, généralement proches des fermes. D’autres sont bien plus escarpées, difficiles d’accès et les machines d’aujourd’hui ne peuvent pas y être utilisées. Ces dernières sont traditionnellement fauchées en tant que foins de rochers.

À l’époque, les faucheurs vivaient plusieurs semaines dans ces pentes, avec des aides pour râteler, faire les filards et descendre le foin jusqu’aux meules ou aux fenils - petites constructions contenant en général un seul local pour entreposer le foin. De là, le foin était ensuite descendu dans la vallée, en hiver, lorsque les conditions d’enneigement permettaient de le luger plus facilement.

Autrefois relativement répandus la plupart de ces foins de rocher ont été abandonnés. Les chaux d’Estavannens ont été fanées jusqu’en 1966. Cette tradition persiste toutefois dans certaines régions du Parc, notamment au Pays-d’Enhaut.

Les foins de rochers aujourd’hui

La tradition de la récolte des foins de rocher est aujourd’hui à nouveau bien présente au Pays-d’Enhaut, en particulier sur les adroits de la chaîne des Vanils, de l’Aiguille (Rossinière) et au Rocher des Rayes (Rougemont). Une dizaine d’exploitants accostent ces fortes pentes pour y récolter un foin à l’odeur de tisane.

D’abord fauché à la motofaucheuse, le foin sèche sur place avant d’être râtelé ou soufflé pour être rassemblé dans des filets d’environ une tonne chacun. En fin de journée, ceux-ci sont évacués par hélicoptère. Le travail se fait bien plus rapidement qu’à l’époque où seule la faux était utilisée mais il n’en demeure pas moins qu’il est difficile et qu’il démontre la valeur qui est accordée aujourd’hui comme hier à la production de fourrage pour l’hiver.

Importance pour la biodiversité

La pratique des foins de rocher joue un rôle important dans le maintien de milieux ouverts en altitude, essentiels pour la biodiversité. Ces zones escarpées, difficiles d’accès, font de bons refuges pour une grande variété de plantes et d'animaux. La coupe tardive, réalisée uniquement à l’aide d’une motofaucheuse sans éclateur, permet de maintenir une flore riche et variée, comprenant des espèces qui pourraient disparaître sous la pression d'une agriculture plus intensive et mécanisée.

Ces surfaces sont d’ailleurs généralement inscrites par les agriculteurs dans les projets de réseaux écologiques qui visent à favoriser la biodiversité en milieu agricole. La fauche ne peut alors se faire que depuis le 15 juillet, assurant ainsi la multiplication des graines des plantes présentes ainsi que la survie d’insectes mais aussi d’oiseaux des prairies qui nichent au sol.

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